Pourquoi ne faut-il pas devenir écrivain ? En effet, l’on retrouve souvent sur internet mille et une raisons de devenir l’écrivain de demain. Pourtant, devenir écrivain possède aussi ses inconvénients. C’est avec une touche d’humour prononcée que je vous invite à en découvrir quelques-uns au sein de cet article. Que les âmes sérieuses s’abstiennent 😉

Pour être méprisé

 De deux choses l’une. Soit vous vous consacrerez exclusivement à l’écriture (parce que vous avez gagné au loto, hérité d’un oncle d’Amérique ou encore parce que vous vivez dans une cabane au fond des bois en vous nourrissant de vers de terre).

Dans ce cas-là, les gens que vous fréquenterez vous considèreront comme un raté et/ou un fainéant. « Devenir écrivain », pour l’immense majorité des gens, ça veut dire : faire quelque chose de totalement improductif au lieu d’aller chercher du gibier pour sa famille.

Soit vous exercerez une autre activité. Dans ce cas, peu de gens vous prendront au sérieux.

Quand vous direz à votre jolie collègue de bureau, en fronçant les sourcils : « Tu sais, je voue ma vie à l’art. Toutes les nuits, je combats les monstres qui vivent au fond de moi. Si tu savais ce que j’endure pour produire ne serait-ce qu’un de ces chefs d’œuvre qui raviront les générations futures », il ne faudra pas vous étonner si elle vous répond : « Ah ben, c’est bien d’avoir un hobby ! Mon mari ce week-end il a pêché une truite grosse comme ça ! »

Pour n’avoir aucun succès amoureux

 Conséquence directe de ce qui précède, vous ne séduirez jamais personne parce que vous êtes devenu écrivain. Qui a plus de succès amoureux que les écrivains ? Laissez-moi réfléchir un instant. Il y a les acteurs, les chanteurs, les sportifs, les cinéastes, les pompiers, les boulangers, les chômeurs, les banquiers, les médecins, les plombiers, les cosmonautes, les géomètres, les vendeurs de la Redoute, les dentistes, les ogres, les gardiens de zoo, les trolls…

Devenir écrivain pour finir aigri

 Après cinquante ans, il y a deux sortes d’écrivains : ceux qui ont reçu le prix Nobel de littérature et les autres. Les premiers croulent sous les honneurs, les seconds crèvent dans l’aigreur.

La grande majorité des écrivains ne reçoit pas la moindre reconnaissance critique ; une petite minorité reçoit quelques distinctions qui ne servent guère qu’à entretenir une soif de reconnaissance insatiable. Et parmi cette minorité, deux ou trois écrivains par génération se partagent les honneurs suprêmes.

Ajoutez à cela qu’il est bien rare d’avoir à la fois les applaudissements de la critique et le succès populaire. Il est déjà si rare d’avoir l’un des deux ! Et comme, pour écrire, vous êtes bien obligé de croire en vous (au début en tout cas, personne d’autre ne le fera !), et même de vous surestimer légèrement, il y aura à la fin un petit décalage entre l’idée que vous vous ferez de vos écrits (« On n’a rien écrit de meilleur depuis les Dix Commandements ») et l’idée que s’en feront vos lecteurs (« Ouais, c’est pas mal… ça rappelle un peu Christine Angot, en moins bien… »)

Comment ne pas devenir aigri quand on est écrivain? Je me souviens d’avoir vu Bernard Werber dans une émission télévisée. En voilà un qui devrait être comblé, me disais-je. Les Fourmis a été un énorme succès.

Eh bien non, on sentait bien que Werber souffrait de n’avoir pas la reconnaissance de l’université, d’être un peu snobé par l’intelligentsia, etc. C’est d’ailleurs souvent un regret des auteurs les plus populaires.

Pour  passer des journées entières sur des problèmes qui dessèchent l’âme

 Si vous devenez écrivain, vous passerez beaucoup de temps seul. Et ce temps sera consacré à des questions parfois très ennuyeuses.

Bâtir une intrigue ou inventer des personnages est plaisant, mais se demander pendant trois heures si l’on doit mettre un point-virgule ou deux points, si les points de suspension sont préférables au point d’exclamation dans telle ou telle phrase, si tel adverbe est nécessaire, si tel adjectif est suffisamment précis, comment diable justifier que monsieur Grouillard se trouve dans telle rue à tel moment (où il doit se rendre compte que sa femme est en réalité un homme politique en vue) ou comment rendre crédible son aveuglement tout au long de vingt années de mariage, tout cela peut vite devenir pénible pour l’écrivain.

Pour ne jamais recevoir un compliment qui fasse plaisir

 Le chanteur est acclamé par la foule en délire dès les premières notes de son tube. Le footballeur entend le stade se lever d’un bond tandis que le ballon fait trembler les filets. Le comédien voit venir à lui, à peine la pièce finie, les spectateurs encore éblouis. Le plombier lit dans les yeux de sa cliente que la réparation de ses toilettes lui procure une sérénité ineffable.

Quand il a fini d’écrire, l’écrivain, lui, est encore et toujours seul. Il en est réduit à imaginer le plaisir qu’aura son lecteur… dans plusieurs mois, si tout se passe au mieux. Dans plusieurs années, si l’œuvre est longue à écrire ou difficile à faire publier. Après sa mort dans les cas les moins favorables. Triste destinée ! Et quand enfin un lecteur vient lui dire que son dernier ouvrage a changé sa vie pour toujours, l’écrivain, plongé dans un nouveau manuscrit, se souvient à peine d’avoir un jour écrit ce livre-là.

Mais toutes ces excellentes raisons de ne jamais devenir écrivain ne décourageront jamais que ceux qui ne sont pas faits pour l’être. Les autres savent bien qu’ils ne peuvent pas faire autrement, et que le plaisir d’avoir écrit une phrase belle et juste, d’avoir créé un personnage marquant ou d’avoir construit une intrigue impeccable vaut largement cette petite contrariété qui consiste à rater sa vie.

Je plaisante, j’ai rencontré personnellement des écrivains épanouis et heureux… On n’est donc pas obligé d’être masochiste pour vouloir devenir écrivain.

Laissez-moi votre commentaire sur le plus gros inconvénient de devenir écrivain !

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