Quand on veut écrire une histoire, connaître le langage des émotions est indispensable :

  • – pour l’auteur, afin d’éviter les blocages et rester motivé
  • – pour rendre ses personnages vivants
  • – mais surtout pour provoquer l’émotion des lecteurs

À ce propos, avez-vous déjà reçu de vrais remerciements de vos lecteurs ? C’est un retour d’une force incroyable. Imaginez : changer la vie de quelqu’un, lui permettre de passer un cap… Je ne parle pas seulement de le distraire, de lui faire oublier son quotidien. Une histoire puissante peut marquer à vie !

Bon, d’accord, certaines histoires peuvent à l’inverse ne rien apporter. C’est non seulement une perte de temps pour le lecteur… mais aussi pour l’auteur qui a passé parfois plusieurs années sur son clavier.

Heureusement, beaucoup d’auteurs prennent les moyens de nous transporter. Ils ne se contentent pas d’écrire des histoires à vendre, ou pour se faire plaisir. Ils y mettent le meilleur d’eux-mêmes, tout en décuplant leur force par le savoir-faire des géants qui les ont précédés.

C’est pour cela que les grandes histoires traversent les continents et les millénaires. Car elles touchent si profondément, qu’elles peuvent atteindre tous les hommes.

Certains pensent que ce n’est dû qu’au génie de leurs créateurs… C’est en partie vrai. Mais en partie seulement.
En réalité, vous pouvez aussi emprunter le chemin des grands. Voici pourquoi.

La source de l’incroyable pouvoir des histoires

Aussi étonnant que cela puisse paraître, toutes les grandes histoires de l’humanité contiennent les mêmes éléments.

Quand l’auteur les met en contact dans un certain ordre, il provoque une émotion.

Comme en alchimie, il suffit de maîtriser les éléments et les mélanger pour faire une bonne histoire !

Hum. J’en vois certains qui sont dubitatifs :
« Tout de même, Eric ! Et la spontanéité de l’auteur dans tout ça ? Et sa créativité ? »

Attention : je ne suis pas en train de dire qu’il n’y a qu’UNE recette unique. Ces éléments peuvent être agencés de multiples façons, comme les 26 lettres de l’alphabet peuvent remplir des milliers de bibliothèques.
Mais pour en faire des mots valides, puis des phrases porteuse de sens, il y a des principes, des règles de l’art.

La raison est très simple : on n’invente pas une histoire pour elle-même. On invente une histoire en vue de générer des émotions chez le lecteur.
Ces émotions ont leurs propres règles : l’auteur ne crée pas leurs mécanismes mais il doit en tenir compte s’il veut arriver à son but !

émotions

D’où viennent les émotions

Dans la vie comme dans les histoires, l’émotion est toujours générée par une représentation mentale ; même quand on sent une chose, on projette une image intérieure, qu’on colore avec nos propres palettes.

Par exemple, quand un inconnu sourit à Pauline, elle ne va pas voir qu’un sourire. Pauline va interpréter ce sourire, en fonction de son propre état émotionnel, de ses propres objectifs, de son histoire, de ses blessures, etc. « Pas mal, ce mec. » « Il me fait penser à Machin » « Encore un qui ne va pas tenir ses promesses… » ou encore « Au secours ! Encore un gros lourd qui veut m’aborder ! » (je vous laisse imaginer d’autres situations…)

Remarquez : l’inconnu n’a fait que lui sourire. Mais ce sourire est tout de suite interprété par Pauline (en fonction de ses expériences, de son analyse de la situation, etc.).

C’est à cette interprétation du sourire qu’elle va réagir immédiatement en ressentant des émotions : crainte, désir, espoir, audace, colère…
Autrement dit : ce n’est pas le sourire directement qui génère l’émotion, mais la manière dont Pauline va « décider » de le prendre.

On a donc un chemin, une articulation :
Objet (le sourire) => Représentation mentale => Emotion

Quand il écrit une histoire, par ses phrases, l’auteur propose à son lecteur une certaine représentation mentale (que le lecteur va s’empresser d’interpréter à son tour), pour lui faire ressentir les émotions correspondantes.

== Petite Note au passage, en cas de blocage ==

Quand vous ressentez une émotion négative, vous pouvez la modifier en changeant votre regard intérieur.
Par exemple, si le blocage est lié à une critique négative mal acceptée (c’est surtout vrai chez les jeunes auteurs, mais ça peut encore arriver chez les auteurs expérimentés), racontez-vous en train d’écrire un succès. Imaginez-vous en train d’écrire des pages lumineuses, explosives, hypnotiques…
Allez-y, essayez. Fermez les yeux et représentez-vous devant votre bloc ou votre clavier. Vous bougez vos doigts : les mots viennent tout seul. Imprégnez-vous de cette émotion incroyable. Ressentez-la. Votre cerveau émotionnel ne fera pas la différence entre la fiction et la réalité. Imbibez-le de ce plaisir d’écrire. Cela pourra déjà faire évoluer votre motivation.

Comment une histoire provoque des émotions

Bon, je vous l’ai dit, l’histoire est une représentation mentale. Précisons un peu le chemin qu’elle emprunte pour susciter des émotions.

Le lecteur est naturellement capable d’empathie : il peut comprendre ce que ressent l’autre. Les neurosciences ont même montré l’existence de « neurones miroirs », activés quand le patient s’imagine ce que l’autre ressent.

Dans une histoire, l’empathie permet au lecteur de comprendre ce que ressentent tous les personnages.

La sympathie, elle, ne s’applique pas automatiquement : c’est le désir que l’autre se sente bien, qu’il arrive à son but personnel.

Dans une histoire, cette sympathie se fixe sur le Personnage Principal. Le lecteur s’identifie particulièrement à lui.

C’est pour cela qu’on a seulement de l’empathie, et non de la sympathie, pour le méchant d’une histoire : quand il est puni, on est content ! On sait qu’il souffre (empathie) et c’est ça qui nous fait plaisir (ce qui est contraire à la sympathie vous l’aurez compris !).

En proposant votre Personnage Principal au lecteur, vous allez provoquer sa sympathie. Et par là, vous allez pouvoir lui faire ressentir la crainte et l’espoir, qui sont les deux émotions fondamentales d’une histoire.

Tout au long de l’histoire, le Personnage Principal se distingue des autres personnages par cette identification.

Remarque : le Personnage Principal, comme tous les autres éléments d’une histoire, n’est qu’une proposition faite au lecteur, qui peut l’interpréter comme il veut. C’est la limite du pouvoir de l’auteur. Cela dit, si l’histoire est bien menée, le lecteur sera quand même fortement incité à s’identifier au Personnage Principal et à vivre l’histoire par ses yeux (oui, dans certains cas, on peut même parler de manipulation du lecteur… mais ce n’est pas le sujet).

Petit exercice !

D’après vous, comment l’auteur peut-il créer cette sympathie du lecteur avec le Personnage Principal ?
Faut-il que le personnage principal soit « sympathique » comme on l’entend dans la vie de tous les jours, des gens qu’on a envie de rencontrer ?

Pour répondre :
—- Basez-vous sur une (ou des) histoires très connues
—- Puis expliquez comment vous faites avec vos propres personnages

Allez, proposez vos réponses en commentaire !