L’incipit dans le roman… mais qu’est-ce que ce terme signifie plus concrètement ? À quoi sert-il dans l’écriture de votre roman et surtout pourquoi est-ce important de chercher à mettre en valeur l’incipit de votre roman ? Ce premier article sur l’incipit dans le roman vous permettra d’adopter une meilleure vision sur la question. Quant au second article sur le sujet… et bien nous verrons

 

Qu’est-ce que l’incipit d’un roman ?

L’incipit d’un roman, ce sont les mots par lesquels il s’ouvre. Autrement dit, c’est le début du livre. Le mot incipit est un terme latin, c’est une forme du verbe incipio, is, ere qui signifie « débuter, commencer ». On pourrait être tenté de dire qu’il y a autant de façons de commencer un roman qu’il y a de romans, mais si l’on y regarde de près, on se rend compte qu’on peut classer les incipit de romans en plusieurs catégories. Et il y a au moins un incipit que nous connaissons tous et qu’on retrouve dans bien des romans, c’est celui des contes traditionnels.

L’incipit des contes

« Il était une fois… » Formule magique de notre enfance ! Ainsi débutent la plupart des contes, et l’expression est si connue que les romanciers s’amusent quelquefois à l’employer pour l’incipit de leurs romans. Mais au-delà de la formule proprement dite, c’est son fonctionnement qui est intéressant. Le « il était une fois » est en effet une façon d’introduire l’action de façon à la fois lente et logique. Si vous vous souvenez de ce que nous disions du schéma narratif, eh bien « il était une fois » est le moyen le plus simple de présenter une situation initiale.

« Il était une fois un royaume lointain où vivait un vieux et méchant magicien » : voilà, vous savez où se passe l’action, vous connaissez un des personnages principaux, et, si vous poursuivez la lecture, vous saurez bientôt ce qui se passe d’intéressant dans ce lointain royaume. Ce sera l’élément perturbateur (ou déclencheur) : « Un jour, un prince qui cherchait l’aventure vint à passer dans ce lointain royaume… »

Vous vous demandez pourquoi je vous parle de conte et de schéma narratif au lieu de vous aider à écrire l’incipit de votre roman ? J’aime votre impatience, mais soyez tranquille, je ne perds pas de vue notre but.

L’incipit in medias res

 In medias res, encore du latin ! Eh oui, encore du latin. Mais pas trop difficile : in medias res, cela signifie simplement « au milieu des choses ». Et vous l’avez peut-être deviné (si vous ne le saviez pas déjà), c’est l’expression qu’emploient les critiques pour désigner ces incipit de roman qui vous plongent d’emblée au cœur de l’action. Ces incipit-là ne présentent donc pas la situation initiale. Quand vous ouvrez le roman, les péripéties sont déjà engagées.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu de situation initiale, mais l’auteur ne prend pas la peine de vous la décrire longuement. En tout cas, il ne commence pas par là. On pourrait voir dans cette façon de faire une réaction contre les débuts de contes, lents et paisibles, mais en réalité Homère l’utilisait déjà. On peut donc estimer que ce procédé est né avec la littérature.

Parmi les incipit de roman in medias res, on peut facilement découvrir des sous-catégories : certains romans débutent ainsi par la réplique d’un personnage (et bien sûr l’on ne sait pas à quoi il réplique), tandis que d’autres s’ouvrent sur une scène d’action dont on ne connaît ni les tenants ni les aboutissants.

Mais parler d’un personnage qu’on n’a pas pris la peine de présenter au lecteur constitue déjà un incipit in medias res. Ainsi la phrase : « M. Grouillard était un employé de banque pervers, fétichiste et paranoïaque » n’est pas un incipit in medias res, mais la phrase : « M. Grouillard noua son écharpe et sortit de la banque » en est un.

Qu’est-ce qu’un bon incipit ?

Ce que montre l’exemple précédent, c’est qu’un début in medias res n’est pas forcément plus dynamique, même si c’est très souvent le cas. On peut fort bien emporter son lecteur avec une situation initiale patiemment exposée et une présentation minutieuse des principaux personnages. Mais malgré tout, je pense que c’est prendre un risque que de trop tarder à lancer la machine, et je vous conseille de ne donner dans les premières pages que les informations qui vous auront paru indispensables.

Par exemple, je ne pense pas qu’il soit très judicieux, en général, de décrire en détail la demeure d’un personnage dans l’incipit d’un roman : bornez-vous à l’essentiel, et si vous tenez à cette description pour une raison ou pour une autre, essayez de voir si vous ne pouvez pas la placer un peu plus loin… Vous pouvez jouer avec les attentes du lecteur et retarder son plaisir littéraire pour le rendre plus intense… mais si vous faites cela au tout début, il risque de s’imaginer qu’aucun plaisir d’aucune sorte ne l’attend !

 

Pourquoi l’incipit de votre roman mérite-t-il une attention particulière ?

Si l’incipit de votre roman est capital, c’est bien sûr parce qu’il doit vous permettre de lancer votre histoire sur de bons rails, mais c’est aussi, et peut-être surtout, parce que le lecteur pressé ne lira peut-être que vos premières lignes ! Si vous êtes un auteur reconnu ou si vous ne vous adressez qu’à un petit cercle d’amis, vous pouvez vous permettre de débuter mollement. Cela peut même, pourquoi pas, relever d’une stratégie : « Tiens, regarde, ami lecteur, ça commence modestement, sans bruit, sans fureur, sans phrases aguicheuses… mais attends un peu, je vais t’en mettre plein la vue dans peu de temps… »

Encore une fois, pourquoi pas ! Mais si vous n’êtes pas dans un des cas que je citais, sachez que bien des lecteurs se font une idée d’un roman sur son incipit. S’il ne leur donne pas envie d’aller plus loin.. Eh bien ! ils ne vont pas plus loin. Et cela vaut évidemment pour ces lecteurs pressés entre tous que sont les lecteurs des maisons d’édition. Pensez-y !

Dans le prochain article sur l’incipit de roman, je donnerai des exemples ainsi que les avantages et les défauts qu’ils représentent.

En attendant, partagez avec moi la façon dont vous préférez débuter un roman. Par une scène de dialogue ? Une scène d’action ? Une description ? …

 

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