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Bonjour à tous,

Avant que le soleil ne tire sa révérence et nous plonge définitivement dans l’hiver, j’aimerais vous emmener en virée. Une dernière mise au vert sur le continent de l’éco-responsabilité.

Sans plus de préambule, immergeons-nous dans Nos contrées sauvages, le premier roman de l’auteure australienne Cate Kennedy.

Pour quels lecteurs :

– Tout public ;

– Consommateurs(trices) responsables et soucieux(ses) de leur impact sur l’environnement ;

– Adeptes de récits engagés ;

– Auteurs en herbe intéressés par ce sujet.

À Ayersville, en Australie, Sandy – hippie-écolo jusqu’au bout des ongles – élève seule sa fille, Sophie, depuis le départ de Rich. L’éternel aventurier refait surface à l’occasion des quinze ans de sa fille et lui propose un trek en Tasmanie. À l’endroit même où, avant sa naissance, lui et Sandy avaient lutté, ensemble, contre la construction d’un barrage. Si la mère voit cette randonnée d’un mauvais œil, l’adolescente gothique, rivée à son portable, et désireuse de prendre le large, fait tout pour arracher l’accord de sa mère.

Une excursion bien loin d’être de tout repos : rancœurs, douleurs enfouies et petits arrangements avec la vérité ressurgissent sur fond d’aventure, pas si héroïque.

Si vous n’avez pas encore lu ma chronique sur La bête par Kenneth Cook, je vous invite à le faire ici.

Commençons par un thème commun aux deux romans : l’écologie.

Cet enjeu clé pour l’Océanie est le cheval de bataille de Sandy. Son objectif : réduire son empreinte carbonique au maximum. Cette lubie, accompagnée de privations et pressions, devient un véritable fardeau pour sa fille, qui voit sa mère se ringardiser en compagnie d’amies toutes aussi illuminées. Évidemment, son bel idéal se heurte en permanence aux lobbies : la grande distribution et la vente de matériel sportif, entre autres… Le camping moderne se fait de plus en plus confortable et sophistiqué, au détriment de notre planète.

Sa meilleure illustration réside dans deux événements, et leurs conséquences, qui semblent lier le sort de l’île : le barrage de la rivière Franklin et la disparition du tigre de Tasmanie.

« Elle essaie alors d’imaginer la montagne entière protégée par des barrières, balisée par des sentiers de gravier. Ou plutôt de béton. Le parc tout entier finirait à la manière du centre d’accueil et d’orientation. Des milliers de touristes se déversant des cars, ressemblant trait pour trait à ceux qui viennent passer la journée à Ayersville en réclamant des frites, des toilettes publiques et la promesse d’une aventure, car ils en veulent pour leur argent. »

Le second confronte la lâcheté à un héroïsme surestimé. Il anime Rich et Sandy aussi bien dans leurs combats que dans leur style de vie. Tout deux mettent en veilleuse leurs travers pour s’enorgueillir de leur action militante. Chez eux, tout est question de compensation.

Enfin, que serait l’adolescence sans la rébellion ? Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce thème n’est pas l’unique apanage de Sophie, mais également celui de Sandy. Elle se révèle être une « mère courage », en pleine crise de la quarantaine et en froid avec une mère qui n’accepte pas son train de vie délirant ; doublée d’une « soixante-huitarde attardée » qui réalise avec beaucoup de mal que le monde change.

Passons au style, ce qui est, pour moi, le gros plus de ce livre. Écrit à la troisième personne, le narrateur omniscient adopte, à chaque chapitre, le point de vue de tous les personnages. Un bon compromis si l’écriture à plusieurs narrateurs vous tente. Ici, aucune glyphe, car l’auteur cisèle le langage de tous.

En bref, un style incisif qui fait ressortir les non-dits sans fard ni fioritures.

Verdict :

À travers ce petit chef d’œuvre, Cate Kennedy nous incite à prendre en considération la fragilité de la nature qui nous entoure, à réfléchir et revoir le tourisme, non plus en tant qu’enjeu économique, mais éducatif et environnemental.

Sans passer, à l’image de Sandy, d’un extrême à l’autre, nous pouvons tous, à notre niveau, changer nos habitudes pour réduire notre impact négatif sur notre belle planète bleue.

Dans une époque où Internet déploie notre curiosité, il nous faut admettre que certaines choses feraient mieux de rester cachées.

Je laisse le mot de la fin à l’auteure, car elle résumera l’ensemble mieux que moi.

« Le monde est si horrible, tellement ravagé que c’en est insupportable. »

je recommande chaudement