Un virevoltant traverse la rue déserte. Le claquement du double battant du saloon brise le silence de ce début de soirée. Une silhouette fine apparaît à la périphérie du champ de vision de Gaëlle. Attablée au comptoir, elle s’enfile une nouvelle rasade de Whisky dans le fond du gosier.
— Tu oses revenir ici ? Moi qui croyais que tu m’accompagnais, mais, voilà, il semblerait que la compagnie des peaux rouges avec leurs Plumes soit plus à ton goût que mes santiags !
Une autre ombre entre dans le bar enfumé de désespoir. Gaëlle s’étrangle…
— Rejoins-nous ! Je sais que tu…
— Tu ne sais rien de moi, Magali. Rien !
Magali n’a pas le temps d’esquisser le moindre geste que Gaëlle sort son encre plus vite que son ombre et met un point final à son roman.
— Tu peux garder Muse, je suis une cowgirl solitaire désormais…
— La lune ne s’est pas encore montrée. Accorde-moi au moins la possibilité de faire la danse de l’éditeur avec toi…
— Pourquoi ferais-tu cela ?
— Nous ne sommes pas si différentes, tu sais… Il y a de la place pour tous dans les bibliothèques !
— Merci, mon amie. Mais laissons une place au Western…
— Je suis d’accord, ces querelles sont l’occasion de belles histoires, je rêve d’en lire quelques-unes !
Magali s’installe sur le tabouret à côté de Gaëlle.
— Alors Calamity, on s’amuse bien ?
— Pas autant que toi, Pocahontas !
— Si on ne peut pas profiter de nos jeux pour se déguiser, quand le ferons-nous ?
— C’est vrai, mais entre une princesse indienne et une aventurière dans un monde d’hommes, mon cœur balance…
— Nous allons bien voir si ça fait autant rêver nos chers scribouillards !